Fish2Fork : l’arroseur arrosé !

Photo Sophie H. Marty

Photo Sophie H. Marty

Dans le cadre d’une action menée, en Provence, par Seafood choices alliance (Alliance produits de la mer) et de son « guide » des espèces à  consommer ou non, ce sont les pêcheurs artisans et certains restaurateurs qui ont été totalement abasourdis des commentaires mis en avant : «  Je vois que mon établissement est noté dans votre classement. Vous parlez d’espèces en référence à  un « guide ». Rien sur le mode de pêche, et la gestion de territoires est absente. Donc, vous encouragez notre métier à  proposer du tilapia (après avoir vérifié le mode d’élevage) ou du flétan du pacifique ? à‡a me paraît un peu loin, pour un projet varois.  J’en veux pas de votre« bouillabaisse ‘, elle n’a pas de goà’t, elle est fade, je ne sais pas qui l’a pêchée, où et comment. Votre poisson, il est terne, mou et farineux. Il a trop voyagé, il en peux plus d’être glacé, il en marre du décalage horaire… Merci de retirer  notre établissement de votre site. Je ne souhaite pas apparaître dans votre classement. Notre démarche auprès des ressources est entière. Celle que vous encouragez s’arrête à  mi-chemin… »

Pour le restaurateur du Pied de Nez au Castellet qui fait la démarche de s’approvisionner directement auprès de pêcheurs professionnels locaux, ces évaluations le font bondir. Nous avons demandé à  plusieurs spécialistes des pêches artisanales, et à  des pêcheurs professionnels, de réagir « à  chaud » sur ces évaluations données par Fish2Fork pour les restaurants varois. En voici quelques exemples :

Monte Christo Le Castellet

Fish2Fork : Pour le chef, la sélection des produits est essentielle et il n’hésite pas à  se rendre sur le port pour juger lui-même les produits. Aussi choisira-t-il plutôt du poisson de ligne qu’il pourra voir et toucher. Les langoustines sont issues de la pêche au casier. En accord avec les engagements pour une mer durable du groupe Relais & Châteaux, il a retiré le thon rouge de sa carte en attendant que les évaluations scientifiques confirment le rétablissement des stocks, et il évite les spécimens n’ayant pas atteint leur maturité, règle d’or en termes de durabilité.

Commentaires : Il y a plusieurs stocks de thon rouge. Duquel s’agit-il ? Si l’on veut parler de durabilité des stocks de thon, il faut aller jusqu’au bout. Les chiffres montrent une nette amélioration. Attendre que les niveaux des stocks soient au niveau des années 50 (année de référence lorsque l’on parle de l’état des stocks optimal si je ne me trompe, après les année de guerre pendant lesquelles la pêche n’a pas été pratiquée) c’est tuer la pêche artisanale, déjà  en difficulté. éviter le thon anonyme, c’est tout à  fait valable, de même que pour bien d’autres espèces  « durables pour l’instant ‘ d’ailleurs, mais pourquoi discriminer le thon rouge issu de la pêche artisanale dont l’on sait qu’il est pêché à  la ligne et en nombre limité par ce segment? Valoriser ces pratiques conduit, à  terme, à  assurer la durabilité du stock ET des communautés de pêcheurs artisans

Commentaire pêcheur : Les professionnels respectent nécessairement les tailles matures. D’où viendraient des poissons « sous-tailles »?

Hotel Excelsior St Raphael

Fish2Fork : Même si le chef n’est pas convaincu que ses clients apprécieraient d’avoir des précisions sur le poisson qui leur est servi dans l’assiette, nous avons particulièrement apprécié de voir figurer la mention d’élevage bio pour le bar et la daurade au menu de ce restaurant car ceci dénote un approvisionnement raisonné. Si les produits d’élevage sont proposes, il est important que cela ne se fasse pas au détriment de l’environnement ; la certification bio garantit le respect de standards de production au niveau de normes environnementales.

Commentaire : Il faudra dire cela au Péruviens, chez lesquels on surpêche les stocks d’anchois (avec les conséquences évidentes sur tous les autres poissons à  un niveau supérieur de la chaîne trophique, vu qu’ils se nourrissent d’anchois) pour donner de la nourriture bio à  ces poissons carnivores d’élevage.  Je suis sà’re qu’ils seront ravis de savoir que les européens mangent du poisson bio.

Fish2Fork : Dans la soupe de poisson on trouve des espèces méditerranéennes girelles, rascasse, vieille et perche, et également des espèces provenant d’Atlantique comme le Saint-Pierre, la lotte et la sole. L’espadon au menu n’est pas de Méditerranée (“on en trouve pratiquement plus” nous dit le chef) mais du Pacifique.

Commentaire pêcheur : L’espadon est régulièrement pêché en Méditerranée en saison (juin à  fin septembre) et les mareyeurs en vendent. Il est possible que le prix de l’espadon du Pacifique soit moindre. Question de choix et de saison…

Côté rue Draguignan

Le site internet du restaurant est bien conçu et attrayant et le menu gagnerait en qualité s’il comportait davantage d’informations sur les poissons proposés comme par exemple la mention de poisson de ligne ou de petits bateaux. Pourquoi ne pas dire aux clients que le merlu qu’ils proposent est un poisson de ligne et que le restaurant a choisi un saumon sauvage d’Alaska dont les stocks sont durables?

Il serait également assez opportun d’ajouter quelques mots concernant leurs pratiques d’approvisionnement en produits de la mer, pouvant notamment figurer à  la page ‘fournisseurs’ de leur site.

Hôtel restaurant Saint Aigulf

Il ne fait aucun doute que cet hôtel place la barre assez haute lorsqu’il s’agit du professionnalisme si l’on en juge la façon dont ils ont traité nos questions. II s’avère que les produits de la mer ont été sélectionnés des quatre coins du monde comme l’illustrent le crabe du Pacifique, le saumon norvégien, la sole hollandaise et le saint-pierre de Chine. Nous apprécions le fait qu’ils osent sortir des sentiers battus pour proposer au client des poissons moins prisés des menus d’ordinaire tels que le lieu noir, la perche, la mostelle, ou le merlan qui représentent des choix durables.

Commentaire : Le saumon norvégien, alors là , on applaudit vraiment, en termes de durabilité. Quelle partie des nombreuses informations circulant, sur la toxicité de ces poissons, sur l’énorme pression exercée par cette industrie sur le peu de stocks sauvages qui nous restent, et sur la contamination des milieux aquatiques, ont ils raté ?  La aussi, les potes péruviens nous saluent.

Par ailleurs, peut être que les informations sur l’acidification des océans, qui met en péril TOUTE la chaîne, TOUT l’écosystème, et pas seulement certains stocks commerciaux, ne leur est-elle pas arrivée non plus ? Transport de marchandise = CO2 = acidification. Privilégier les poissons locaux, pêchés avec des techniques à  l’impact minimal, sera toujours un meilleur choix. Connaissez vos pêcheurs ! Apprenez à  accepter (tout) ce que la mer leur donne, au jour le jour !

Commentaire pêcheur : Les espèces méditerranéennes à  valoriser ne manquent pas mais le lieu noir, la perche, le merlan sont plutôt « atlantiques ».

Nous aimerions cependant voir figurer davantage d’informations au client sur les menus et sur leur site afin d’indiquer la provenance des produits et la méthode de pêche si celle-ci est connue. Le restaurant ne semble cependant pas utiliser de produits de la mer de la liste des espèces à  éviter et nous sommes donc ravis de les accueillir ‘au club’ des restaurants bleus Fish2fork.

Les gorges de Pennafort Callas

Il est indéniable qu’un établissement de cette qualité n’aspire qu’à  offrir ce qui se fait de mieux en termes de qualité et de goà’t. Toutefois, le client ne dispose que de peu d’informations en ligne concernant les produits de la mer. Pendant les quelques petites minutes que M. Da Silva nous a accordées, largement occupé  » et on le comprend très bien  » entre le marché, son potager et les cuisines, nous avons appris que le chef utilise des poissons et crustacés provenant directement de Bretagne et qu’il s’agit pour l’essentiel de poisson de ligne. De plus, ici, pas de thon rouge ou autres espèces en danger au menu. Nous sommes persuadés qu’une conversation plus approfondie avec le chef, nous permettrait d’élucider les quelques zones d’ombre qui subsistent encore, par exemple sur la provenance exacte du cabillaud qui, selon la zone de pêche, pourra être considéré comme durable ou non.

O bistrot des artistes Toulon

C’est une entrée directe dans la « zone bleue ‘ des restaurateurs responsables du guide Fish2fork pour le Bistro. C’est toutefois une entrée en matière un peu timide qui mériterait d’être approfondie. En effet, il est bien agréable de voir la mention de la provenance en ce qui concerne les moules d’élevage de Tamaris et nous cautionnons bon nombre de leurs choix de poissons proposés. Dommage que les méthodes et zones de pêche ne soient pas mentionnées sur l’ensemble des produits de la mer au menu.  Alors en piste les Artistes pour un score encore meilleur !

Au sourd Toulon

Il est bien agréable de faire la connaissance d’un restaurant et d’un chef qui propose tout à  la fois une vaste gamme de poissons, connus et méconnus, de Méditerranée, mais également des espèces en provenance de l’Atlantique. Nous apprécions par ailleurs le fait que le chef et patron respecte les cycles des espèces, telles que les oursins et Saint-Jacques qui n’apparaissent au menu que lorsque la saison s’y prête.

Ici, la quête de qualité et de fraîcheur est première. Notre conseil pour inciter Au Sourd à  améliorer son score Fish2fork serait de rechercher auprès de ses fournisseurs des informations plus précises concernant les zones et les méthodes de pêche employées et de les relayer ensuite, de façon plus détaillée au client (au menu ou sur le site du restaurant).

Lou Pebre d’Aï Plan d’Aups

Nous comprenons la frustration du chef M. Carteri quant au manque d’infrastructure valorisant la pêche locale (et durable !). Celui-ci aimerait voir s’installer une structure pérenne dans la région, avec des points de collecte qui lui faciliteraient la vie comme celle de nombreux autres chefs. Lou Pèbre d’Ai a déjà  mis en place quelques mesures pour réduire sa consommation d’énergie et ses déchets. C’est très bien ! Toutefois, nous souhaiterions les encourager à  étendre leur démarche à  leur approvisionnement en produits de la mer durables.

Le restaurant nous informe qu’il indique bien le nom des espèces au menu et différencie les poissons sauvages des poissons d’élevage. En obtenant davantage d’informations auprès des fournisseurs sur les origines des poissons, ils pourront ensuite les transmettre au client ce qui nous permettrait par ailleurs de dresser un bilan plus précis du restaurant. Le cabillaud, par exemple, peut être durable ou pas, selon le stock dont il provient.

Commentaire : En Norvège, chaque fjord abrite un stock de cabillaud différent Ne serait-il pas plus simple de choisir son pêcheur et ses techniques de pêche ?

La grange Le Beausset

La bonne connaissance et le respect des saisons et cycles naturels des espèces en dit long sur l’expérience et le professionnalisme  du chef de cuisine. Ainsi, il sait sélectionner les plus gros spécimens de poissons (qui ont eu le temps de se reproduire) et refuse  les écrevisses lorsqu’elles sont porteuses d’oeufs. Nous apprécions le fait que le restaurant recherche aussi un produit de la région comme les écrevisses plutôt que de se rabattre sur les crevettes tropicales qui sont souvent d’élevage ou de pêche non durables.

Nous aimerions cependant connaître l’origine et la méthode de pêche des rougets et autres poissons à  la carte et voir cette information relayée au client sur le menu ou le site internet.

Restaurant la Colombe Hyères

Le chef comprend parfaitement les attentes de sa clientèle, mais il est aussi sensible aux problèmes environnementaux notamment aux enjeux de la surpêche, car il aime s’adonner au plaisir de la plongée sous-marine. La lotte, le saint-pierre, le homard et le crabe figurant au menu sont originaires de Bretagne, tandis que le bar et la daurade sont des produits d’élevage français. La pêche locale du jour leur permet de proposer denti, daurades et rougets.

Tous ces choix sont acceptables selon nous, cependant nous souhaiterions voir davantage d’informations transmises au client sur les menus ainsi que sur leur site internet. Enfin il serait important que le chef se renseigne auprès de son fournisseur de gambas afin de savoir si elles proviennent de l’élevage, auquel cas il serait judicieux de rechercher un produit d’élevage “AB” ou certifié d’aquaculture responsable. En tout cas c’est une assez bonne entrée au guide Fish2fork que réalise La Colombe qui pourrait facilement s’envoler pour un score encore plus élevé.

Le pied de nez Le Castellet

Nous apprécions le fait que l’établissement a établi des liens et se fournit auprès de pêcheurs appartenant à  des prud’homies qui ouvrent pour le futur de la ressource et de leur profession. De ce fait, il propose des espèces locales moins communes telles que la mostelle, le barracuda, la sériole, le sar, mais aussi les incontournables tels que le merlu, le maquereau de Méditerranée, le turbot, la rascasse.

Cependant, le thon rouge reste une espèce emblématique de la surpêche et de la pêche illégale même s’il semble que des progrès sont à  noter suite à  la médiatisation de ces dernières années et surtout suite à  la mobilisation de certains professionnels qui ont suspendu leurs achats pour sauver cette espèce. La recommandation de ne pas utiliser du thon rouge est encore maintenue, en attendant les prochaines évaluations des scientifiques.

Nous comprenons que le Pied de Nez ne propose que très rarement cette espèce et ne se fournit qu’en pêche locale et artisanale mais les recommandations scientifiques sont basées sur l’état du stock dans leur globalité et malheureusement, pour cette espèce, quelque soit la méthode de pêche, la ressource est toujours menacée. Si les efforts sont maintenus et partagés par tous, il n’y a pas de raison que cette espèce ne puisse pas être à  nouveau remise à  l’avenir à  la carte, sous réserve d’être issue de la pêche artisanale.

Commentaire pêcheur : Pour un prud’homme local, cela n’a pas de sens de ne pas pêcher des thons rouges qui sont très abondants, même en terre. On en voit quasiment toute l’année. Il s’en pêche accidentellement par des engins qui ne leur sont pas destinés (filets poste, entremails à  soles). Cette abondance a été reconnue par tous ceux qui vont sur la mer. Elle déséquilibre les autres espèces. Pourquoi, par exemple, ne trouve t-on plus de sardines dans le golfe ? Le thon est une espèce bien valorisée qui permet de rentabiliser notre activité devenue très difficile à  cause des conditions climatiques. Nous avons réduit quasiment de moitié le nombre annuel de journées de pêche…

Bento Sushi Draguignan

Nous apprécions tout particulièrement le fait que la maison ne propose ni thon rouge, ni anguille européenne sur sa carte (ces deux espèces étant en danger critique). De plus, le restaurant est avide de connaissances et d’informations plus approfondies concernant la durabilité des espèces ce qui ne peut que jouer en leur faveur.

Il est un peu dommage cependant que ce restaurant qui fournit des efforts dans sa quête de qualité à  tous les niveaux, ne précise pas sur son site internet ou au menu le fait qu’il recherche des produits de pêche de petits bateaux (comme pour les maquereaux par exemple) ou du poisson de ligne. Il y a très peu de sushi-bars qui adoptent cette démarche.

Le seul véritable bémol tient aux crevettes utilisées qui, même si elles proviennent d’élevage, ne sont pas durables. En effet, les élevages de crevettes représentent des enjeux environnementaux très importants dans les zones où ils sont pratiqués (dans les régions tropicales). Il est donc important de s’orienter vers des élevages certifiés “AB” (Agriculture biologique), ou certifiés d’aquaculture responsable ou vers des produits de pêche dont les stocks sont durables. Nous comprenons qu’il existe des restrictions budgétaires mais l’enjeu en vaut la peine.

Commentaire : Pendant que l’on y est, cherchons donc aussi QUI est derrière les labels « responsables ‘ d’aquaculture des crevettes, qui sont produites à  plus de 90% dans les zones de (ex)mangrove. Un exemple : l’équateur avec 70% de destruction de la mangrove. Le premier marché est la France. La mangrove, un bien public protégé par la Constitution, est occupée illégalement par les éleveurs de crevettes. Le produit de cette aquaculture, en revanche, n’est pas illégal. Il est même parfois responsable Et la cohérence dans tous cela ? Veut-on se donner bonne conscience, ou décide t-on de poser les bases d’un futur où nous serons mieux nourris, tout en préservant nos ressources et nos économies locales de petite échelle ?

Lou Galoubet Draguignan

Un restaurant tel que celui de Lou Galoubet pourrait aisément améliorer son score en indiquant de manière systématique le nom précis et l’origine des espèces de poissons proposées à  la carte et sur le site internet, ainsi que les techniques de pêche utilisées.

Ce restaurant utilise des gambas dans sa cuisine, et il n’est pas seul dans ce cas.  Mais cette espèce présente malheureusement de nombreux enjeux environnementaux. Il serait important de s’orienter vers des espèces d’élevages certifiés “Agriculture Biologique” ou certifiées d’aquaculture responsable ou vers des espèces sauvages certifiées “durables”.

Le Gourmandin Le Luc

Nous ne doutons pas que dès que nous pourrons entrer en contact avec les cuisines pour nous entretenir avec le chef – qui est bien sà’r, et on le comprend, très pris par son activité  – nous aurons la confirmation que l’établissement prend un grand soin dans la sélection des produits qu’il travaille. Fish2fork, le guide des amateurs de poisson durable, aimerait notamment en savoir un peu plus sur l’origine des poissons tels que les rougets, l’espadon et autres produits de la mer proposés car malheureusement, il ne figure aucune indication au menu ou sur le site internet du restaurant. Nous souhaiterions par exemple savoir si l’établissement suit une démarche qualitative et durable pour ainsi revoir leur note, nous l’espérons, à  la hausse.

Chez Laurent Le Lavandou

Le chef nous a ainsi appris que le bar et la daurade proviennent d’élevages en Grèce, la lotte, le lieu jaune et le merlu de Bretagne, les moules sont d’Espagne et d’Italie et les Saint-Jacques sont d’origine France et Ecosse.  Tous ces choix sont acceptables et leur permettent donc d’obtenir un score dans le bleu, ce qui est toujours appréciable. Leur note pourrait encore être améliorée en se renseignant sur la provenance exacte du cabillaud qui entre dans la composition de mets tels que la Marmite du pêcheur ou le Brigadeou.   Cela nous permettrait de savoir s’il s’agit d’une pêche durable. Enfin sélectionner des bars et daurades certifiés aquaculture responsable ou labelisés BIO permettrait d’améliorer leur note davantage. En tout cas, une pas trop mauvaise entrée en matière pour Chez Laurent.

Commentaire : Acceptables ? Quelle est la  ligne à  ne pas franchir pour être « acceptables », qui la décide et de quel droit? Les pêcheurs artisans qui pêchent dans le respect des lois  (extrêmement contraignantes, voire inadaptées car généralement conçues pour la pêche industrielle) ne fournissent-ils pas un produit acceptable ? Il ne s’agit pas là  d’un instrument de contrôle technique mais un jugement de valeur, établi par des entités qui ne sont ni élues ni représentatives (et dont les intérêts sont méconnus). Si l’on veut entrer dans le domaine des valeurs, il faudrait un débat élargi et transparent, avec les pêcheurs, les scientifiques et les consommateurs, et qui plus est, en se plaçant à  la bonne échelle, vu la complexité et la grande diversité des situations que l’on peut rencontrer. La généralisation et la simplification à  outrance ne reflètent pas une attitude responsable. Une meilleure traçabilité, en revanche, peut peut-être servir à  donner  plus d’éléments d’information (biologie du poisson, lieu et méthode de pêche, date de capture, qui a pêché le poisson, éventuels procédés de transformation ou de conservation, etc.) pour que les restaurateurs et les consommateurs puissent faire leurs propres choix responsables.

Restaurant Les Oliviers Bandol

Notre conversation avec le chef nous a permis d’établir que le restaurant ne propose pas de thon rouge, et ne travaille pas non plus de poissons issus de « bateaux-usines ‘. Pour autant, nous encourageons les Oliviers à  informer davantage le client, sur son site internet et sur les menus, notamment au regard des efforts qu’ils entreprennent déjà  en faveur de la petite pêche locale pour tout ce qui est maquereau, denti, et daurades par exemple. Ce supplément d’information sur les méthodes de pêche utilisées et la provenance des produits de la mer proposés leur permettrait de gravir quelques échelons supplémentaires dans le classement Fish2Fork.

La table du mareyeur Port Grimaud

Lors de notre entretien, ce restaurant semblait réellement soucieux de proposer un menu durable mais s’interrogeaient de la faisabilité d’un point de vue économique. La majorité des poissons servis proviennent de Bretagne et, à  quelques exceptions près. La Table du Mareyeur ne semble pas proposer d’espèces que nous déconseillons en termes de durabilité mais les informations manquent. Nous aimerions avoir davantage d’informations sur les origines des produits de la mer utilisés. L’utilisation de crevettes tropicales représentent des enjeux environnementaux très importants dans les régions où elles sont élevées.  Nous les encourageons donc à  orienter leur approvisionnement en crevettes labellisées ou provenant d’élevages bio. Il serait intéressant également de communiquer ces informations aux clients.

Bérard La Cadière

Ici, la cuisine semble éviter les espèces menacées de surpêche ou en danger, tout en valorisant l’information auprès de ses clients. Nous apprécions les mentions « sauvages ‘ et  « de Méditerranée ‘ sur les menus, et nous les félicitons d’y différencier le thon et la bonite. La mention “poisson d’élevage” pourrait venir compléter cette volonté générale d’information.

Toutefois, sans avoir pu nous entretenir avec le restaurant, il subsite quelques interrogations. Nous aimerions par exemple connaître l’origine des produits de la mer indiquée de façon plus systématique dans les différents menus et les techniques de pêche utilisées comme pour les rougets par exemple.

Le girelier Saint Tropez

Nous avons bien apprécié la coopération et l’accueil du patron lors de notre appel, ainsi que sa passion et sa bonne connaissance des produits de la mer qu’il propose.  Leur préférence se tourne autant que possible vers des produits de pêche locale, mais leur quête est avant tout la qualité.

Pour Fish2fork, un autre critère de sélection vient immédiatement compléter la qualité, il s’agit de la durabilité, et cela est tout à  fait à  leur portée. Ils proposent déjà  un saumon bio alors pourquoi ne pas rechercher des gambas labélisées bio également ?  Nous aimerions aussi connaître l’origine précise du cabillaud qu’ils proposent, car plusieurs stocks sont surexploités, d’autres sont considérés en bon état.

Commentaire : ON VA JUSQU’A ENCOURAGER L’APPROVISIONNEMENT EN PRODUITS d’ELEVAGE TROPICAUX ? Nous en restons bouche bée.

 Yôkoso Hyères

Malheureusement nous n’avons pas réussi à  obtenir de réponses à  nos questions concernant leur approvisionnement qui, de prime abord ne semble pas présenter de trop gros problèmes sauf pour les crevettes qui, si elles sont d’élevage, ne représentent pas toujours un choix très durable. En effet, les élevages de crevettes représentent des enjeux environnementaux importants dans les zones où ils sont pratiqués (dans les régions tropicales). Les farines alimentaires pour ne citer que cet exemple, sont constituées essentiellement de poissons sauvages prélevés en grande quantité causant ainsi un état de surpêche. Ainsi, il est préférable de choisir des crevettes issues de l’agriculture biologique ou bien certifiées d’aquaculture responsable.

Commentaire : Comment ? Alors on peut élever des poulets bio, nourris au soja et au maïs bio, pour nourrir du poisson bio à  l’autre bout de la planète et tout va bien dans le meilleur des mondes ?

Peut-on rappeler que les labels bio sont nés pour valoriser les aliments produits de façon « naturelle ‘ ? Qu’y a t-il de naturel dans le fait d’élever des crevettes avec des produits agricoles ?

Quelques précisions supplémentaires permettraient au restaurant Yôkoso de voir son score s’améliorer, notamment s’il entreprend d’indiquer au client (au menu et sur le site internet) la provenance des produits de la mer utilisés ou en nous confirmant quelle est l’espèce de thon qu’il cuisine.

Restaurant les pins – Sillans la Cascade

La transparence de l’établissement concernant l’origine des mets proposés nous permet d’établir une bonne traçabilité, qui représente déjà  le début de la solution. De plus, le gérant et son chef ont une bonne maîtrise des poissons et on apprend ainsi que le saumon, le bar et les écrevisses proviennent d’élevages de la région. Autre point positif, le restaurant sert des poissons de rivières tels que le brochet ou le sandre. Pour le reste, c’est un véritable tour du monde avec des espèces provenant d’Indonésie, d’Argentine, ou d’Islande dont la durabilité peut varier selon les zones et méthodes de pêche ou les conditions d’élevage. Il semble donc important d’obtenir des informations précises de la part des fournisseurs.

Les Pins est en quête perpétuelle de produits de qualité et recherche aussi à  réduire son empreinte carbone ce qui est tout à  son honneur. Nous les y encourageons et serions ravis de les aider à  établir des liens avec des pêcheurs de la région afin de sélectionner des produits de Méditerranée durables.

Les voiliers Hyères

Nous ne doutons pas de l’importance que ce restaurant porte à  la qualité des poissons utilisés en cuisine, mais nous sommes quelque peu déçus qu’ils n’accordent que si peu d’intérêt à  leur provenance. Certes, nombreux sont encore les restaurants qui ne sont pas sensibilisés à  la cause environnementale et à  la préservation des ressources de la mer, mais nous espérons que notre guide contribuera à  changer cette tendance. Il est en effet de plus en plus important que les professionnels tels que les cuisiniers s’approvisionnent durablement pour contribuer à  la préservation des ressources. 

Le restaurant propose du cabillaud qui provient de la mer du Nord mais ce stock est malheureusement surexploité. Le restaurant ne semble pas travailler d’autres espèces en danger, mais les informations manquent. En se renseignant auprès de leurs fournisseurs sur les provenances et les méthodes de pêche ou d’élevage des poissons utilisés, en s’orientant vers des espèces durables et en relayant cette information au client (par leur site internet ou sur les menus), le restaurant pourrait facilement obtenir une note bien supérieure. Nous sommes prêts à  les aider à  hisser la grand’ voile!

La table St Raphael

Nous avons ainsi constaté qu’il n’y a que peu d’informations sur les produits de la mer proposés. On sait que les crevettes sont sauvages, mais pas le pays d’origine (beaucoup de stocks sauvages sont en danger). On ne sait pas quel est le thon proposé ; s’agit-il du thon albacore ou du thon rouge par exemple ? Le premier peut encore figurer au menu quant au second, c’est une espèce en danger. Il serait donc judicieux de le préciser pour les clients qui souhaitent se régaler en toute connaissance de cause. L’avenir du poisson et autres produits de la mer est l’affaire de tous, et chacun peut ?uvrer à  son niveau, du pêcheur au consommateur en passant bien sà’r par le restaurateur. Nous serions ravis d’approfondir le sujet avec La Table s’ils le souhaitent.

Bistro Frégate Six Fours les plages

Seuls quelques petits changements permettraient au Bistrot Frégate d’améliorer son score Fish2Fork et de le faire basculer dans la zone bleue de notre classement car il y a des points très positifs comme le fait qu’ils signalent les poissons « sauvages ‘ sur le menu et qu’ils utilisent parfois du poisson de ligne.  Nous avons apprécié leur coopération pour répondre à  nos questions.

Il serait important par exemple de préciser l’origine précise des crevettes proposées, et de s’orienter vers des crevettes certifiées pour garantir qu’elles ont été pêchées (ou élevées) dans des conditions respectueuses de l’environnement. En effet, la plupart des pêches de crevettes sauvages posent problème en termes de durabilité (alimentation, captures accessoires). Nous aimerions également connaître les provenances des produits  de pêche et les techniques de pêches utilisées et que cette information soit mise à  la disposition du client.

Les Voiles St Raphaêl

Nous leur conseillons, afin d’améliorer leur score à  notre guide, de se renseigner sur l’origine des produits de la mer qu’ils proposent: d’où provient le cabillaud présenté à  la carte par exemple ? Les crevettes sont-elles sauvages ou d’élevage ? Il serait important de proposer des crevettes certifiées AB (Agriculture Biologique) ou d’aquaculture responsable pour celles d’élevage ou des crevettes de pêche durable car les enjeux environnementaux sont très importants pour cette espèces.

Il serait utile de préciser que le thon servi est du thon albacore et non pas du thon rouge. Ces pratiques vers une démarche durable permettraient de valoriser leur carte.

L’esplanade Sanary

Quel dommage que notre entretien avec l’Esplanade ne nous ait pas permis de répondre à  l’ensemble de nos interrogations. Nous aurions aimé par exemple connaître l’origine de produits tels que le cabillaud ou les gambas qui sont des espèces à  durabilité variable selon la zone de pêche et les techniques utilisées ou encore les conditions d’élevage pour les produits d’aquaculture. Quelle est l’espèce de thon utilisé ? thon albacore ou thon rouge ? Si le premier peut être recommandé selon sa provenance, le second en revanche est une espèce très fragilisée.

Brasserie Bertin Draguignan

Les choix de la Brasserie sont plutôt bons en termes de durabilité quand sont proposés des produits tels que lieu noir. Les zones d’ombre au tableau sont les crevettes et le cabillaud. Avec davantage d’informations sur la zone et la technique de pêche pour le cabillaud ainsi que la provenance et les conditions d’élevage/ou de production pour les crevettes,  il nous sera possible de revoir le score de ce restaurant.

 Nous espérons que notre appel incitera le Chef à  se renseigner auprès de son fournisseur afin d’obtenir plus d’informations sur les poissons qu’il commande (zone de pêche, état du stock, technique de pêche). Nous sommes conscients qu’il est parfois difficile d’obtenir ces informations de la part des fournisseurs, mais si tous les restaurateurs demandaient ces informations, cela permettrait d’améliorer la traçabilité de l’ensemble de la filière, et de mieux informer les consommateurs.

A Maurin des Maures Canadel sur mer

Rien ne nous ferait plus plaisir que d’aider ce restaurant à  améliorer son score. Les enjeux sont pour les espèces suivantes : les gambas, la dorade rose, et le cabillaud qui posent problème en matière de durabilité.

Nous leur proposons de discuter plus en détail de leur approvisionnement et de trouver des solutions durables car nous estimons que le Maurin, dont la réputation n’est plus à  faire, aura à  coeur de s’assurer que ses menus soient aussi durables que bons.

En complétant la démarche avec des informations pour les clients sur les menus ainsi que sur leur site internet, au sujet de la provenance des produits proposés ainsi que la méthode de pêche utilisée, il ne fait aucun doute que M. Del Monte et son équipe sauront rapidement décrocher un bon score dans la zone bleue au guide Fish2fork.

La rascasse La Seyne sur mer

Malheureusement, La Rascasse n’a pas souhaité répondre à  nos questions concernant les produits de la mer qu’ils utilisent ; il est donc difficile, en ne jugeant que par les menus présentés sur leur site internet, de connaitre l’origine des mets proposés. Cependant, quelques signes encourageants nous laissent à  penser que cet établissement pourrait facilement obtenir une bonne note à  notre guide en apportant quelques informations complémentaires. Nous apprécions particulièrement la description des ingrédients contenus dans les plats comme le Panaché de la Mer ou la Mini-marmite. La mention « sauvage ‘ est parfois précisée sur les menus et nous les en félicitons. Cependant, dans le cas précis des crevettes, il serait important de préciser l’origine précise, et de s’orienter vers des crevettes certifiées. En effet, la plupart des pêches de crevettes sauvages posent problème en termes de durabilité car elles sont notamment responsables d’importantes captures accessoires.

Herrero restaurant

Nous ne pouvons que féliciter le chef Eric Henry pour son souci de qualité et de fraîcheur de tous les ingrédients qu’il sélectionne et en particulier des produits de la mer. Les poissons utilisés en cuisine sont issus de pêche locale ou d’ailleurs comme de Bretagne pour les fruits de mer. 

Nous apprécions aussi le fait qu’il recherche un bar sauvage mais que lorsque celui-ci n’est pas disponible, il s’oriente sur un produit d’élevage bio.

Lorsqu’il propose de l’espadon, ce n’est pas un produit de Méditerranée car ils sont rares et trop petits, mais un produit de l’Océan Indien dont les stocks sont en bon état.

Seule véritable ombre au tableau, le thon rouge figurant sur la carte du restaurant. Même si celui-ci provient de pêche de petits bateaux et non de thoniers industriels, il n’en demeure pas moins que le thon rouge reste pour le moment une espèce en danger.

Quel dommage car sans le thon rouge au menu, Herrero obtiendrait une très bonne note à  notre guide. Une solution serait de suspendre son utilisation et de s’orienter vers d’autres espèces telle que la bonite par exemple.

Commentaire pêcheur : Quand on sait qu’un thonnier senneur pêche son quota en une semaine (entre 100 et 150t), c’est qu’il y a vraiment abondance de poissons ! En moyenne les petits bateaux ont 2t (soit une centaine de poissons, ce qui est rien. Une petite matte de poissons, c’est un millier de poissons). Pour assurer la rentabilité d’un petit bateau, il faudrait lui accorder 10 t. La diversité des apports pour nous, pêcheurs artisans, cela permet de répartir les captures et les occasions de vente entre les pêcheurs, pour la bonne entente de tous. C’est aussi notre façon de gérer le territoire. Si les restaurateurs ne nous soutiennent pas en achetant nos apports, c’est désespérer de l’avenir de la pêche…

 Autre commentaire d’un spécialiste des pêches  :

Vive les importations et l’aquaculture pourvu qu’elles soient certifiées « acceptables » par des gens qui sont aussi, sans doute, les financeurs de fish2fork ! Je crois que ce qui est en cause c’est cette stratégie  » market based » promue par les ONGE et le Partenariat Mondial pour les Océans pour mettre les pêcheurs sous tutelle, au lieu de bâtir des relations de confiance entre pêcheurs et restaurateurs. Les uns et les autres sont aptes à  juger ce qui est durable ou non, et quand. Par exemple, l’an dernier le jugement sur le stock de civelles était  » stock en danger ». Cette année, il y a abondance mais on maintient les restrictions. Idem pour les langoustines : mauvaises pêches pendant deux ans ; depuis novembre, les pêches semblent revenir. Quand les pêches sont mauvaises, faut-il pénaliser pour autant le pêcheur sur les ventes alors que les quantités sont faibles ? Acheter plus cher un poisson plus rare si la pêche est poursuivie raisonnablement peut aider les pêcheurs à  passer ces mauvais moments, alors que refuser l’achat les enfonce encore plus. Je suis contre ces listes qui incitent, en fait, à  rechercher du poisson industriel, facile à  identifier et à  certifier (MSC). C’est au consommateur de s’adapter à  la pêche, pas l’inverse.

Ce contenu a été publié dans Communication. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.