Boues rouges : lettre du prud’homme de La Ciotat à  Ségolène Royale, ministre de l’écologie

© Photo Philippe Houssin

© Photo Philippe Houssin

Madame Le Ministre,

Mon nom est Gérard CARRODANO. Je suis Premier Prud’homme des pêcheurs professionnels de La Ciotat, assermenté et vice-président du comité régional des pêches de la région PACA. J’ai également un rôle de sentinelle de la mer pour l’Agence de l’Eau. à‚gé de soixante ans, je pratique la pêche artisanale depuis plus de trente ans dans la zone qui est aujourd’hui le Parc National des Calanques.

En tant que Ministre de l’Ecologie en charge du dossier : « ALTEO : Boues rouges de Gardanne ‘, vous allez devoir statuer prochainement sur le renouvellement de l’autorisation de rejets issus de cette usine en mer.

élu par la profession, mon devoir est de vous faire part de ma propre analyse sur la zone impactée que je connais très bien. Il y a une trentaine d’années, il nous fallait atteindre des profondeurs de plus de 250m pour remonter nos engins, filets ou palangres, enduits de boues. Aujourd’hui, cela se produit à  des profondeurs d’environ 120m, c’est-à -dire à  la bordure basse du plateau continental. Ce qui veut dire tout simplement que la fosse profonde qui permettait « d’évacuer ‘ les boues dont la toxicité ne fait plus aucun doute est saturée.

Il y a trente ans, nous pêchions, en périphérie de cette zone, des congres, daurades et autres mérous de grands fonds, mais à  ce jour, la chaîne trophique est totalement déséquilibrée et nous ne pêchons plus.

L’industriel n’a eu de cesse que de gagner du temps en faussant la réalité de l’impact des rejets et exerçant un chantage à  l’emploi. S’il y a une corporation qui n’a cessé de diminuer, c’est bien celle des pêcheurs artisanaux qui sont pourtant les garants de la bonne santé de la mer. Les analyses que vous avez demandées récemment s’effectuent sur les quelques survivants de passage sur le Canyon de Cassidane, ancien poumon nourricier de la zone Marseille-Cassis-La Ciotat.

Les traces indiscutables de ces résidus s’étendent du sud du tombant dans l’Est de Toulon jusqu’à  Sète très à  l’ouest, avec même des échantillons de boues prélevées en Espagne. Les dernières analyses de l’Agence Nationale pour la Sécurité Sanitaire (ANSES) sont sans équivoques.

En région PACA ce sont 600 bateaux soient 900 familles de marins qui sont touchées par ce fléau.

Lors de la création du Parc des Calanques, il nous a avait été promis de façon certaine et unanime que la naissance de ce parc signifiait l’arrêt des rejets. Envisager de renouveler une autorisation de rejets toxiques comprenant entre autres : Mercure, Arsenic, Titane, Thorium, Uranium.serait irresponsable, dans la mesure où l’ensemble de la chaîne trophique s’en trouverait à  nouveau impactée.

L’usine de Gardanne qui a 120 ans est vétuste et plus du tout aux normes environnementales. Par respect pour l’environnement et les générations futures, sans oublier les riverains de Gardanne directement contaminés, au nom de la santé publique, nous vous demandons de faire respecter la Convention de Barcelone. Quelle image pour l’Ecologie et le bon sens !! Il est difficile d’admettre qu’en 2015, 270m3 par heure de résidus toxiques se déversent 24h/24 dans le Parc des Calanques, joyau de la Provence.

Je me tiens à  votre disposition pour plus d’informations « de terrain ‘ si vous le souhaitez et vous prie d’agréer madame Le Ministre, l’expression de ma considération distinguée.

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